Mon espace pro

Pépiniere Chauviré – Crédit photo : Agathe F.

Partout en Europe, les entreprises horticoles peinent à trouver la main-d’œuvre nécessaire à leurs productions. Des serres nordiques aux pépinières italiennes, les problématiques sont identiques et la tendance est la même : la saisonnalité du travail, qui entraîne une forte dépendance à la main-d’œuvre étrangère. Et, au-delà du manque de main-d’œuvre saisonnière, c’est aussi un déficit de compétences qui se fait sentir, notamment pour les postes de conduite de culture, de maintenance ou de logistique.
Les évolutions rapides, impulsées par les contraintes environnementales et les progrès technologiques, évoluent plus vite que l’actualisation de l’enseignement sur ces sujets. De plus, le vieillissement des équipes expérimentées en place accentue la tension. L’image parfois dévalorisante de ces métiers, les conditions de logement dans certains pays et les salaires modestes limitent aussi l’attractivité auprès des ressources humaines locales, jeunes et moins jeunes.

[Durée de lecture : 11 minutes.]

Recruter dans le domaine de l’horticulture en Allemagne, Italie ou Espagne

En Allemagne, la filière horticole/paysagère rencontre des difficultés de recrutement significatives. Une réduction des nouveaux contrats d’apprentissage dans certaines spécialités affecte la relève. La raréfaction de la main-d’œuvre qualifiée dans les entreprises limite la capacité à envisager de nouveaux projets et investissements. Le recrutement international et l’intégration de migrants rencontrent des difficultés politiques et réglementaires. Des actions, comme les formations pour le renouvellement des chefs d’entreprise (~60 ans), une meilleure représentation des femmes dans les recrutements et les améliorations de rémunération, sont considérées comme des leviers.

En Italie, l’on constate une pénurie structurelle de main-d’œuvre qualifiée, un vieillissement des effectifs traditionnels, une faible attractivité pour les jeunes et une forte dépendance au recrutement de travailleurs étrangers, facilité toutefois par l’utilisation de quotas migratoires étatiques, principal outil de régulation du marché du travail.

En Espagne, l’horticulture dépend fortement d’une main-d’œuvre migrante saisonnière recrutée via des dispositifs adaptés. Mais malgré ces programmes, la filière fait face à une pénurie persistante de travailleurs liée au manque d’attractivité des métiers, à la forte saisonnalité. Les difficultés sont aggravées par des conditions de travail et de logement parfois précaires, ce qui accroît le turnover et expose les entreprises à des risques sociaux et réputationnels.

Recrutement aux Pays-Bas, au Royaume-Unie et dans les pays scandinaves

Aux Pays-Bas, la situation se distingue par une filière hautement technologique, qui exige de plus en plus de compétences très qualifiées, ce qui ajoute une dimension « savoir-faire spécifique » au problème de recrutement. Cette évolution génère une polarisation entre une main-d’œuvre hyper qualifiée et le recours élevé à une main-d’œuvre étrangère et saisonnière, de plus en plus difficile à recruter. Le peu de fidélisation des jeunes travailleurs met aussi en évidence un problème de réputation et d’attractivité du métier. La consolidation des entreprises et leur automatisation réduit toutefois le nombre d’emplois.

Au Royaume-Uni, le départ d’un grand nombre de travailleurs étrangers suite au Brexit a exacerbé le problème de main-d’œuvre. La saisonnalité des métiers en horticulture est peu attractive pour les travailleurs britanniques. L’emplacement rural et éparpillé des exploitations crée des difficultés de transport et d’hébergement. Les besoins en compétences techniques et en supervision augmentent. Un rapport de la Royal Horticultural Society (RHS) souligne « un effectif stagnant, un vieillissement du personnel en place, des difficultés à recruter des personnes ayant les bonnes compétences et à attirer des apprentis ».

Pour les pays scandinaves, on peut relever des tendances communes avec les pays ci-dessus : forte dépendance à la main-d’œuvre saisonnière, souvent étrangère. Zones rurales éloignées, métiers physiques réputés pénibles, travail saisonnier à faible attractivité pour les jeunes locaux. Par rapport aux autres pays européens, les salaires et les conditions sociales sont pourtant globalement plus favorables. Le contexte géographique (climat, saisons courtes) et la taille des exploitations peuvent limiter l’automatisation ou les économies d’échelle que d’autres pays ont pu déployer.

En conclusion

À l’échelle européenne, la pénurie de main-d’œuvre horticole n’est plus conjoncturelle mais structurelle. C’est également le cas en Amérique du Nord et en Australie. Les leviers clés pour la décennie à venir seront probablement : la modernisation et la promotion de l’image du secteur pour attirer les jeunes (innovation, caractère durable, intérêt des métiers verts), le renforcement de la formation technique et pratique actualisée aux évolutions technologiques actuelles et futures, une gestion durable et respectueuse des travailleurs migrants. Mais il faudrait aussi imaginer des solutions pour l’adaptation au vieillissement (attractivité des carrières longues), qui devient une piste intéressante pour conserver et faciliter la transmission des savoir-faire et de l’expérience dans les productions végétales.

Brand WAGENAAR, Novembre 2025

À télécharger

  • Sources : veille internationale semaines 45 à 48 2025